Vue la renommée internationale de Michaela Melián, on va faire quelques présentations. Allemande, approchant doucettement des 30 ans de carrière en tant que bassiste au sein groupe F.S.K., elle a décidé certainement au changement de millénaire de se lancer dans ce projet solo avec lequel elle sort ici son deuxième album. N’ayant jamais écouté le premier opus, on ne fera pas ici de comparaison et on abordera Los Angeles comme un album de découverte de l’artiste.
Cela a beau n’être que son deuxième album, Los Angeles est tout de même l’œuvre d’une artiste qui a un certain bagage dans le domaine et c’est peut-être ce qui explique la maturité dont il fait montre. Ouvrir sur une pièce de 10 minutes à la rigueur toute germanique et au minimalisme ascétique permet de cerner le sujet. On semble deviner une influence de l’école allemande minimale (techno, electro) mais le choix des instruments acoustiques – piano et guitare – nous font également penser aux répétitions de Steve Reich, tandis qu’à mi parcours une rythmique pointilliste kraftwerkienne bouleverse la donne. Pour arranger le tout, l’allemande n’oublie pas que la musique est aussi vecteur de sensations, d’émotions et sa musique est également une réussite sur ce plan avec des mélodies parfois subtiles mais qui font mouche, limite mélancolique même sur Föhrenwald avec ses boucles de mélodica, cordes pincées, ses notes de glockenspiel traitées et son violoncelle langoureux. Généralement calme, construite sur des boucles plutôt fines, la musique de Michaela Melián se renouvelle régulièrement, proposant du coup un album d’une heure qui ne lasse jamais. On alterne entre l’épure minimaliste et le son dense et chaleureux de textures grésillantes, et on appréciera l’apport d’une électronique utilisée avec parcimonie et justesse, souvent pour de légers effets et transformations des sonorités acoustiques, aidée sur cette partie par Carl Oesterhelt, également membre de F.S.K.. Sur la deuxième moitié de l’album les rythmiques se libèrent offrant alors des mélanges originaux puisque celles-ci flirtent avec la techno tandis que la musique reste principalement acoustique avec cordes aux tonalités orientales (Stift) ou piano (Convention).
Un album intéressant et plutôt attachant, et presque un parcours sans faute si l’on omet un titre ou deux un peu moins inspirés. Pour finir de manière à la fois surprenante et cohérente, Michaela Melián termine son album avec Memento, une reprise d’une chanson de Brian Ferry. Surprenante car il s’agit du seul titre chanté de l’album, mais cohérente puisque sur son premier album, Baden-Baden paru en 2004, elle concluait déjà avec une reprise de Roxy Music ! 6/8
Fabrice Allard